La grève c’est comme La Samaritaine, par Ludovic Roubaudi

Carte blanche de Ludovic Roubaudi

C’est vrai ça. On trouve de tout dans les cortèges syndicaux.
Hier j’étais en vadrouille et je suis tombé sur une intersyndicale de footballeurs. Drapeaux FO et CGT en tête, ils défilaient pour la défense de leur emploi, de leurs conditions de travail et de leur salaire.
Moi forcément je m’étonne et je commence donc à leur causer.
– Dites les gars, vous n’avez pas l’impression de charrier. Vous n’êtes quand même pas à plaindre.
– Alors ça c’est bien facile ! Parce que vous ne connaissez pas la réalité de notre vie professionnelle, vous vous permettez de nous juger.
– Je ne juge pas je m’étonne.
– Eh bien, laissez-moi vous dire mon cher monsieur que notre vie n’est pas drôle. Tenez, sur les horaires de travail par exemple. Saviez vous que les prolongations n’étaient pas payées en heures supplémentaires !?
– Non.
– Eh bien voila. Maintenant vous le savez. Si c’est pas un scandale… et le pire c’est que tout le monde s’en fout. Alors nous, on défile pour que les prolongations soient comptabilisées en heures sup’.
– Je comprends.
– C’est comme le banc !
– Le banc ?
– Ben oui, le banc. Quand on est remplaçant.
– Oui et alors?
– Eh bien, nous n’avons aucun dédommagement…
– Au moins vous êtes payés.
– Là n’est pas le propos monsieur. Etre sur le banc c’est une sanction unilatérale. L’entraîneur, le représentant du patronat si vous voulez, peut le faire sans aucune consultation du Comité d’Entreprise. Et ça, ce n’est pas légal. Etre sur le banc est une sanction professionnelle due au fait du prince. Et nous sommes contre ce type de management autocratique. Il faut une prime de banc.
– Mouais… mais quand vous êtes sur le banc, vous avez droit aux primes de match.
– C’est la moindre des choses… mais si vous n’êtes pas sur la feuille de match vous n’y avez pas droit.
– C’est normal, vous ne jouez pas.
– Ah ! Ah ! Ah ! Mais c’est trop facile ça. Depuis quand peut-on vous sanctionner financièrement parce que votre patron ne veut pas que vous travailliez ? C’est du libéralisme dangereux. Alors nous manifestons… mais ce n’est rien encore comparé aux matchs en CFA.
– CFA ?
– Un championnat de seconde zone. Quand vous vous relevez de blessure, ou que l’entraîneur pense que vous n’avez pas votre place en ligue 1 (sur quelles bases le juge-t-il ? Mystère. Encore une dérive ignoble du patronat) vous allez jouer dans ce championnat. Eh bien nous sommes contre.
– Je m’en doutais.
– Nous sommes contre car c’est une requalification abusive qui n’entraîne pas un avenant au contrat de travail. Que diriez vous si, en rentrant de congés maladie, on vous demande d’effectuer une période dans un emploi moins qualifié que le vôtre ?
– Je ne serais pas content.
– Ah, vous voyez. Bon, je vous laisse, faut que j’y aille.
– OK. Salut.
– Merci camarade…

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